Le verdict vient de tomber : accusée de plagiat par le chausseur Christian Louboutin (pour avoir pourvu de semelles rouges certains modèles de sa collection croisière 2011), la griffe Yves Saint Laurent a finalement eu gain de cause...
Avril 2011, New York. De passage à Manhattan, Christian Louboutin voit rouge en découvrant les "Tribute", "Palais", "Woodstock" et autres "Tribtoo" d'YSL au coeur des vitrines chic de la ville. Il faut dire que certaines d'entre elles, déclinées en all-over cerise, arborent le signe distinctif de sa propre griffe depuis 1992 : les fameuses semelles écarlates. Piqué au vif, le créateur ne tarde alors pas à déposer plainte contre YSL pour "concurrence déloyale" et "violation de marque commerciale".
Très vite, une bataille juridique s'engage entre les deux parties : alors que Louboutin exige que soit respecté son monopole tacite sur la semelle rouge, YSL lui rétorque qu'il s'agissait ici de décliner des modèles monochromes, du bleu au rouge en passage par le jaune. Sur le papier, la position d'YSL semble la plus défendable...
On imagine en effet assez mal la rue Cambon accuser Isabel Marant de produire des vestes en tweed rappelant celles imaginées par Gabrielle Chanel, Sonia Rykiel réclamer des royalties à DKNY pour avoir utilisé des rayures multicolores ou encore Jean Paul Gaultier poursuivre tous ceux ayant l'outrecuidance de revisiter la marinière...
Oui mais voilà, à l'ère de la contrefaçon à outrance, on aurait pu s'attendre à un peu plus de fair-play de la part d'une maison telle qu'Yves Saint Laurent. En imaginant des escarpins aux semelles rouge vif, cette dernière ne pouvait en effet ignorer le risque de semer la confusion dans l'esprit de ses clientes, pour la plupart familières des créations de Christian Louboutin.
Et si le juge fédéral Victor Marrero a donné raison à l'accusé en déclarant que "compte tenu du fait que dans l'industrie de la mode, la couleur a des fonctions esthétiques et ornementales décisives pour alimenter la compétition, le tribunal estime qu'il est difficile pour Louboutin de prouver que ses semelles rouges jouissent de la protection d'une marque déposée", difficile de croire qu'YSL ait pu candidement oublier, le temps d'une collection croisière, l'indéniable filiation entre Christian Louboutin et les emblématiques semelles rouges...
En tentant de distribuer ses créations rouge monochrome outre Atlantique, la maison Yves Saint Laurent a donc brusquement rompu l'accord implicite - visant à respecter une certaine éthique - qui était jusqu'ici en vigueur entre les grandes griffes de luxe. La boîte de Pandore est désormais ouverte...
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